Dans le Tableau

Dans un tableau tout a une âme et une personnalité. Le peintre les connaît avant de les avoir dessinés. Et une fois dans la toile ses personnages ont leur vie à mener…indépendants. Jean François Laguionie le sait bien. Il l’a surement ressenti lors de sa longue carrière d’auteur de films d’animation alors qu’il donnait le souffle de vie à de milliers de bonshommes animés. Depuis 1965 il a commencé par La Demoiselle et le Violoncelliste et poursuivi avec une dizaine de courts-métrages et 3 longs-métrages (Gwen et le Livre de Sable,1985, Le château des Singes, 1999, L’ile du Black Mor, 2004). Aujourd’hui dans les salles on peut voir sa dernière création Le Tableau dont le titre ne peut être plus éloquent. Lui même, il ne s’est jamais considéré un peintre, mais dans ce film on ne peut que le voir en tant que tel. Toute l’ironie, la tristesse, l’amour, l’humour pour l’être humain qu’il a dessiné dans ses films précédents nous les retrouvons dans Le Tableau.

Le film met en place un scénario d’Anik Le Ray qui traverse l’art visuel dans ses différents états ce qui demande un graphisme de rare qualité dans la production des longs-métrages d’animation d’aujourd’hui. Les dimensions sont aussi multiples : conçu en 3D avec un équipe d’une vingtaine d’animateurs le film est cohabité de manière très naturelle par les images de prise de vue réelle (seulement dans la dernière séquence), les dessins en 2D classique ou en 3DS Max dans le contexte de traversées de l’espace.

Les personnages d’Anik Le Ray vivent dans une organisation sociale définie par le niveau d’achèvement que leur créateur leur a imposé. Le créateur est le Peintre de ces petits hommes « condamnés » à leurs yeux à toujours dans un tableau inachevé. Est-ce que un bout de veste non coloré prive celui qui la porte de sa personnalité ? Et quoi dire alors de ceux qui n’ont meme pas de couleur, pauvres petits hommes esquisses ? Il est tellement nonchalant cet artiste qui ne se rend pas compte de la responsabilité qu’il porte en tant que créateur … C’est dans ces conditions « humiliantes » et extrêmes qu’une non-finie, un tout-peint et un rough décident de chercher le peintre pour qu’il assume jusqu’au bout son rôle. Et le voyage nous porte à travers des tableaux…des pays, des fantaisies, des souvenirs, des connaissances et des inconnus. Après le tableau de bataille faisons connaissance de l’Amante, poursuivons avec une promenade à Venise.

Les enfants à bouche ouverte, regards fixés dans l’écran suivent avec beaucoup d’amusement ces aventures, lors que nos héros parcourent les mondes pour chercher leur créateur avec l’inquiétude pour la bien aimée du tout-peint et pour tous les autres non-finis et roughs. Le monde visuel de Jean François Laguionie se révèle étonnant et magique comme on le connaît, et même encore plus riche et plus complexe. Son style pure mais aussi très pictural et tendre nous plonge naturellement dans un conte magique qui est aussi une métaphore aux rapports et la hiérarchie dans laquelle on grandit et prend connaissance du monde.

La sagesse d’un auteur qui a vu la naissance d’une époque d’or du film d’animation avec Paul Grimault et son sensibilité perçante envers les faiblesses et les passions de l’homme qui se font deviner ici. Mais ce n’est pas avec l’amertume que on se rappelle de La Bombe que Le Tableau se déplie aujourd’hui. Le film, serein dans ses couleurs et dans son message est destiné à la réussite en face du jeune public.

Et le reste ? Le reste est pour les adultes, jeunes… Les considérer, c’est une mission dont peu de films d’animation se soucient. Ceux qui sont grandis à leur gré ou à contrecœur personne ne leur demande si une fois dans la salle obscure ils ne veuillent pas se rappeler de tout ce que avec l’années devient absurde et « infantile ». C’est cette innocence de l’imagerie enfantine qui nous est permise et qui nous embrasse à travers Le Tableau comme quand on était petits.

Courts-métrages[1]

Longs-métrages[2]

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